Qu’est-ce que la « présomption de légitime défense » pour les policiers ?
1. La notion de légitime défense
En France, contrairement à ce qu’on pourrait croire, les policiers n’ont pas de protection juridique particulière : ils doivent se trouver en situation de légitime défense pour pouvoir faire usage de leur arme.
La légitime défense, prévue à l’article 122-5 du code pénal, est le fait de ne pas être reconnu comme pénalement responsable si l’on réplique à une menace, dans certaines limites.
En clair, un policier ne peut pas, sans qu’il y ait ensuite une enquête, tirer sur une personne qui prend la fuite, par exemple. Il n’a pas non plus, toujours sans risquer d’enquête, la possibilité d’utiliser une arme à feu pour faire face aux attaques portées par un groupe de personne non armées (car il y a disproportion de moyens).
2. Le régime particulier des gendarmes
Les gendarmes, eux, sont des militaires, qui bénéficient d’un autre statut et d’autres règles, prévues dans l’article L2338-3 du code de la défense, qui donne tous les cas où ils peuvent faire l’usage de la force armée
En clair, un gendarme peut tirer sur un suspect qui s’enfuit ou sur un véhicule qui force un barrage sans être inquiété (même si un juge a toujours la possibilité de juger du contraire). La loi va même plus loin, puisqu’il est autorisé à tirer dès lors qu’il « ne peut défendre autrement le terrain qu’il occupe », par exemple.
Qu’il s’agisse de policiers ou de gendarmes, la règle de droit reste indicative : comme le rappelait Le Monde dans une affaire remontant en 2010 à Draguignan (Var), un gendarme a été mis en examen pour homicide involontaire après avoir tiré sur un suspect en fuite. Quant aux policiers, la justice est en général plutôt compréhensive lorsqu’ils font usage de leurs armes. Mais il y a quasiment systématiquement une enquête.
Une revendication portée par Alliance police nationale et les Républicains
Tous les policiers ne souhaitent pas cette modification de la loi, que défend, entre autres, Marine Le Pen. Elle est surtout réclamée par le syndicat Alliance police nationale, proche des Républicains. Chez ces derniers, c’est le président du conseil général des Alpes-Maritimes, Eric Ciotti, qui est le plus en pointe sur la question.
Après les attentats des 7 et 11 janvier 2015, il a proposé de donner aux policiers une présomption de légitime défense dans plusieurs cas, notamment en cas de « danger imminent », de refus de déposer les armes au bout de deux sommations, ou lorsqu’un policier subit des « violences graves » de la part d’individus non armés. Mardi 3 novembre, lors de la présentation d’une batterie de mesures pour « renforcer la sécurité des Français », Nicolas Sarkozy s’est également montré favorable à ce que gendarmes et policiers « bénéficient de la présomption de légitime défense ».
Si Bernard Cazeneuve semblent aujourd’hui opérer une inflexion sur le sujet, il continue à insister sur la nécessité de ne pas « remettre en cause les principes de droits constitutionnels et européens », qui vont plutôt dans le sens d’un usage de l’arme en ultime recours.